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La bagagerie, c’est parti

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Enfin, pas chez nous…

Nous vous racontions via le quotidien régional Sud Ouest il y a quelques temps, les problèmes rencontrés par un projet de création de bagagerie dans le centre de Bordeaux, notamment avec les riverains. Devant initialement compter 150 casiers, les porteurs de projet ont réduit la capacité d’accueil de la bagagerie à 50 casiers. Après des mois de tourments, la bagagerie a enfin ouvert ses portes.

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Après des semaines de polémiques, cette structure unique, où les SDF peuvent déposer leurs valises et se doucher, vient d’ouvrir. Simplement et tranquillement.

Hier matin à la bagagerie. Près de la moitié des 50 casiers sont occupés. © Stéphane Lartigue

Toute une vie dans un casier. Chaque jour, des SDF viennent à la bagagerie de la rue Ausone pour y déposer une valise ou un sac qui contiennent « des vêtements », « les papiers », « le nécessaire à toilette ». Parfois quelques objets chers à leurs propriétaires – vieux jouets, photos… « La valise, c’est notre maison, il ne nous reste plus que ça » dit Sébastien. Mohammed nuance : « C’est aussi un fardeau ! Quand ils nous voient avec nos bagages, les gens nous cataloguent. Je connais des camarades qui en ont si honte qu’ils marchent toute la journée sans oser se poser quelque part avec leur sac ».

Comment trouver du travail, ou faire des démarches quand on trimballe un tel fil à la patte ? Question sans réponse jusqu’à l’ouverture, la semaine dernière, de cette bagagerie unique en Aquitaine, qui prolonge, en fait, une expérience tentée dans un cadre plus informel, un squat de la place André-Meunier.

Cinquante casiers

Ce service occupe le discret rez-de-chaussée d’un immeuble situé à mi-chemin entre la place du Palais et le cours Alsace-Lorraine. C’est un lieu ordinaire : deux tables, une dizaine de chaises, quelques fauteuils, quelques journaux, une cafetière… À droite, deux vestiaires avec une douche. À gauche, une mini-buanderie équipée d’une machine à laver.

Et au fond, retranchée derrière le guichet des deux animatrices, la salle des casiers : une cinquantaine de casiers d’un blanc immaculé, dont la moitié est, hier matin, occupée. Une semaine après sa mise en route, la bagagerie n’est ni vide, ni bondée, « il y a toujours un peu de monde », commente un habitué. « L’info a bien circulé parmi les SDF, qui parlent beaucoup entre eux, notamment à la gare », précise Catherine, l’une des responsables du site. Elle est la seule, avec sa collègue, à pouvoir accéder à la salle des casiers, fermée à double tour et dûment surveillée. « Pour nous, c’est un soulagement de pouvoir laisser sa valise et surtout ses papiers en sécurité. Les papiers, c’est très difficile à faire refaire. Quand on est sans domicile fixe, on vit dans l’angoisse de les perdre. Certains se font dépouiller la nuit, d’autres les égarent quand ils ont trop bu », confient Mohammed et un ami.

Hygiène et sécurité

Les bénéficiaires de la bagagerie viennent donc pour la sécurité, et, souvent, pour la propreté, pour l’hygiène « C’est jouissif de se doucher et de prendre un café le matin après avoir passé plusieurs nuits à dormir dehors… », explique Christopher, 24 ans. Dormir ? Pas vraiment d’ailleurs. « Je me pose, je somnole, je me réveille, je repars… Alors venir ici le matin, ça me fait du bien. C’est très propre et c’est calme ».

Cette tenue doit beaucoup à la (forte) personnalité des deux responsables de la bagagerie. Deux femmes, ceci expliquant peut-être le respect que leur témoigne un public très masculin.

Surtout, Annick et Catherine ont, dans le passé, connu la rue. Elles n’ont pas l’expertise de travailleurs sociaux, mais elles ont l’expérience. Elles savent écouter sans s’en laisser conter. Et elles veillent sans faiblesse à l’application des règles, invisibles mais fermes, qui balisent le quotidien de la bagagerie. Par exemple ? « Nous ne tutoyons jamais les SDF, nous ne posons pas de question ; nous ouvrons les valises pour en vérifier d’un coup d’œil le contenu, mais nous ne touchons jamais les affaires pour ne pas paraître intrusifs. Nous pouvons tolérer les chiens à l’intérieur, mais il est exclu qu’il y ait des chiens à l’extérieur… Notre objectif premier, c’est qu’il y ait du respect de part et d’autre ».

Calme démarrage
L’implantation de cette bagagerie a suscité de nombreuses contestations parmi les commerçants et les riverains, qui ont regretté d’avoir été peu informés en amont et jugeaient le projet initial (150 casiers) disproportionné.

Depuis, le projet a été revu à la baisse (50 casiers). « Ce fut une grande leçon de politique pour moi : ne pas trop s’avancer en donnant des chiffres qui, au final, prennent le pas sur l’aventure humaine », explique l’adjointe Alexandra Siarri, présente quasiment tous les jours à la bagagerie. Elle constate : « Les gens qui viennent ne sont pas, souvent, de « grands errants » mais des gens qui ont envie de rebondir, qui veulent se laver et se débarrasser de leur valise pour faire des démarches ». Les commerçants situés à proximité de cette structure (un salon de coiffure, un restaurateur, un caviste) jugeaient hier, au diapason, que « pour l’instant, tout se passe très calmement, il n’y a pas eu de problème ». Certains disaient toutefois avoir « un peu d’appréhension pour cet hiver. »

Julien Rousset

À lire en ligne sur le site de Sud Ouest

 


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